Habitant du 93 je viens apporter ma pierre à l'édifice socio-culturel de mon pays. En espérant qu'aucun mur ne me tombe dessus.
Je viens pousser un coup de gueule. Moi qui etais venu dans le 93 pour les fuir. Loin de Paris j'étais heureux avec mon épicier pakistanais qui me vendait des bananes plantins. De mon libraire chinois qui me vendait des enveloppes. De mon postier antillais qui me refourguait ses pubs. Et de ma laverie pleine d'africains qui me proposaient leur séchoir tout chaud !
Maintenant j'ai quoi ? Les blancs...
Voila que la hausse des loyers et la crise les ont poussés hors de Paris attirés par le m² carré le moins cher d'Ile de france. Leur invasion massive en plus d'augmenter mon loyer, a augmenté mes charges. Leur obsession de la sécurité leur a fait poser des cameras à tous les étages. Et je parle pas des centaines de rappels à l'ordre posés sur les murs pour dire qu'il ne faut pas faire de bruit, pas faire la fête, pas jeter ses ordures n'importe comment. Bref à la limite ne pas sortir de chez soi sans respirer.
Là où avant chacun allait de son bonjour j'ai maintenant le droit a des regards suspicieux, dédaigneux voire des sursauts entre deux ouvertures de porte d'ascenceur. Mon concierge portugais regrette nos échanges sur les accras de morue. Il reçoit à présent recommandé suivi d'injonction, et autre menace de licenciement pour ne pas avoir empêché la petite vieille qui arrondit sa retraite de distribuer des pubs dans nos boites aux lettres.
La fête des voisins s'est transformée en buffet mondain avec des petits fours, et des oeufs de lompe. Mais moi je veux mon mafé, mon tajine, et ma baklava ! Sans compter que le blanc au lieu de manger les animaux vit avec. Mon petit bout de verdure en bas de mon immeuble s'est transformé en champ de mines. J'ai pas perdu de jambes mais mes adidas.
J'ai donc décidé de faire des soirées zouk chez moi, et de cuisiner du colombo la porte ouverte. Je sais que les blancs n'aiment pas le bruit et l'odeur. Ma tactique m'attire les foudres de mes voisins, ils parlent déjà de m'expulser. Par avion, par bateau, ou à coup de pied au cul, ils ne veulent plus de moi chez eux. Même si ce chez eux c'est aussi mon chez moi !
La police frappe régulièrement à ma porte mais malheureusement pour eux j'ai toujours sur moi et surtout chez moi mes papiers. Je les sens nerveux, colériques. Durant les élections dans le bureau de vote installé dans l'école maternelle je les voyais me regarder, un petit rictus au coin des lèvres, et un prénom Marine sur le front. Mais rien ne m'abattra.
Nous aussi, on a décidé de faire front commun, le Turc qui a du fermer suite à une lettre anonyme à l'inspection sanitaire est avec moi ! Et nous aussi nous allons leur montrer que dans le 93 soit tu nous aimes soit tu nous quittes !
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